Il tique; le problème n’est pas là et il te croit avec toutes les fibres de son être, mais le problème c’est qu’il ne savait même pas par où commencer. Ça semblait évident dans tes paroles, mais sauras-tu même lui expliquer en des mots qu’il comprenait jusqu’au fond de son être? C’était là tout le problème des explications, elles devaient se faire comprendre de ceux qui les écoutaient. Quand bien même, son visage rougit par les larmes semble se calmer – il est au moins dans de meilleures dispositions pour t’écouter, mais qui sait si cela sera suffisant. Papillonnant des paupières comme pour chasser les derniers vestiges de larme de ses yeux, le voilà qui les pose sur toi avec hésitation, comme si ton image brûlait ses rétines et qu’il avait peur de se faire mal. Ton expression n’a rien de chaleureuse, certes, mais il y est habitué – à vrai dire, il n’aurait su dire s’il s’attendait à quoi que ce soit d’autre. Dans ses grands yeux noirs on devine difficilement ce à quoi il pense… ce qui n’aide aucunement ce qui va suivre.

« Je sais »  dit-il, et dans sa voix on note une intonation surprise; il t’observe en silence, comme ne comprenant pas pourquoi tu dis qu’il n’y a pas de si j’y retourne; évidemment qu’il n’y aura pas de retour, ça il l’avait bien compris. Pendant un instant il se demande pourquoi tu penses qu’il pleure, pourquoi tu penses que son monde s’effondre, sinon pas que parce qu’il ne peut pas y retourner. C’était une tournure de phrase qui pouvait porter à confusion, sûrement, mais il l’avait empruntée directement à Aomine. Alors il se trouble, ne sachant pas quoi dire d’autre que de nommer l’évidence, quand bien même elle lui faisait mal et lui tordait les tripes et le laissait avec une impression de vide à l’intérieur. Pourtant, Rhapsody devrait en avoir l’habitude; c’était le genre de chose qui était fréquente depuis Everwilde High… et pourtant ce n’était pas plus facile d’une fois à l’autre. Le rejet est quelque chose qui lui faisait mal, tout simplement. Surtout quand il ne savait pas trop ce qu’il avait fait de mal. Enfin, ici, il s’en doutait, hein.

Il penche toutefois la tête sur le côté, comme considérant ce que tu venais de dire.  « Mais je suis l’oiseau »  et à vrai dire, Rhapsody ne faisait pas la distinction parce qu’il ressent l’oiseau dans sa tête son cœur sa vie, que si vous aimiez l’oiseau alors pourquoi ne pas aussi aimer l’humain? Il reste la même personne, le même être d’une forme à l’autre. Si vous aimiez l’humain il était tout normal de penser que vous aimeriez l’oiseau, alors pourquoi pas l’inverse? Les nuances se perdaient pour lui – il ne voyait pas que les gens agissaient autrement avec un oiseau qu’un humain, que certains aimaient les animaux, mais pas la compagnie d’autre de leur espèce. Parce que les humains sont plus compliqués (plus méchants).

Intrusif… ses yeux s’agitent alors qu’il considère la chose; c’était un concept avec lequel il avait du mal, mais il te faisait confiance. Si tu disais que ce l’était, il te croyait – mais il ne comprenait pas. Lui qui chantait toujours pour les autres, il ne pouvait comprendre qu’on puisse faire de la musique pour soit; qu’on veuille en garder les secrets et la beauté rien que pour soit, l'espace d’un après-midi de pratique en tout cas. Pour lui la musique était un cadeau au monde, aux autres, alors évidemment qu’il se sentait comme s’il avait le droit de profiter de la musique d’Aomine, quand bien même elle fût sienne.  « Merci »  dit-il tout de même en récupérant son bras, se levant pour fouiller dans un tiroir de commode pour en sortir un pull aussi large que doux, comme un nuage. Il se sentait bien plus confortable ainsi affublé, à vrai dire, même s’il n’avait pas pu mettre le doigt sur la chose.

Il dit, du bout des lèvres;  « Et depuis ma fenêtre… je peux? Ou c’est mal ça aussi? »  hésitation parce que de demander c’est de risquer de se faire dire qu’il n’avait pas le droit; mais depuis la fenêtre c’était pas plaisant, parce qu’il savait qu’Aomine ne pourrait pas l’entendre chanter. Ce n’était, tout simplement, pas pareil.